Coach de vie vs Voyance : Les voyants ne se contentent plus de prédire l’avenir ; ils guident aussi et soignent les traumas du passé.
Chefs d’État, PDG, actrices ou commun des mortels consultent… Lumière sur un phénomène pas si irrationnel :
En 2013, un article du New York Times racontait combien il était devenu normal pour américains de ne pas signer un contrat ou de conclure une transaction immobilière sans l’aval du tarot de Marseille. The Hollywood Reporter nous apprenait aussi que, de New York à Los Angeles, la clientèle des médiums se compose à 70 % de magnats, de producteurs, de cadres, de banquiers, pour lesquels les décisions rationnelles comportent finalement un facteur chance.
Dans l’Hexagone, le marché de la voyance explose : 3 milliards d’euros, plus de 100.000 voyants exerçant et un nombre de consultations par an qui est passé de 8 à 15 millions entre 1994 et 2011.
Les soirées tarots cartonnent dans les cercles branchés.
À Paris, les soirées tarots cartonnent dans les bars branchés. Le climat anxiogène actuel a boosté notre intérêt pour la voyance : « Les pratiques ésotériques ont toujours existé dans nos sociétés. Mais depuis la désertion relative des lieux de culte, on les voit davantage.
Beaucoup d’entre nous ont besoin de mettre des mots sur des problèmes, et quand ce n’est pas le psy, ce sont les voyants qui s’en chargent. Ils donnent un sens au malheur des gens et reconstruisent la dramaturgie de leur destin, en la rejouant devant eux, avec une fin heureuse qui redonne de l’espoir. »
M, a diversifié son activité en proposant du coaching émotionnel, pour lequel elle a obtenu un diplôme.
Avocats, cadres sup’, stars et personnalités politiques se pressent chez cette femme au regard perçant. « Pendant la consultation, si je vois que la personne engluée dans les mêmes schémas est apte à franchir un pas, je lui propose un coaching/planning avec des objectifs précis. »
“Les gens veulent du résultat”
Le fait d’être médium permet de sentir dans quel sens on peut améliorer la vie de la personne, estime-t-elle.
Quant à F.D, médium et cartomancienne, elle offre du coaching plus spirituel, fondé sur l’aura et le passé karmique du client : « Je vais analyser forces et faiblesses, et dire quels sont les moments propices pour monter une affaire, déménager, quels sont les domaines de la personnalité à travailler. Si c’est nécessaire, je redirige mes clients vers des médecins, des psys, des homéopathes. »
Coach de vie vs Voyance :Le voyant peut-il pour autant tenir le rôle d’un thérapeute classique ?
Beaucoup procèdent désormais comme des coatchs. Ils vont commencer par une lecture du passé, du présent et de l’avenir, puis diversifier leurs activités avec de la numérologie… Ils se forment souvent à partir de multi-connaissances ésotériques liées à leur expérience de terrain.
De leur intuition simple, ils font une profession avec diversification des produits. » Ainsi Danielle a-t-elle déclaré en interview avoir surmonté un coup de blues à grand renfort de séances de voyance.
« C’est vrai qu’il y a un marché, soulève G.H. Les gens aiment bien que tout aille vite, ils veulent du résultat. » Pour Béatrice, écrivain de 32 ans qui a fait du coaching émotionnel avec M après une rupture amoureuse délicate, ça ne fait aucun doute : la médium a été plus efficace qu’un psy. « Elle a su sonder en moi ce qui me correspondait pour me sortir de cette épreuve de la vie et m’a aidée en un temps record. L’avantage a été de se livrer intégralement sans jugement, sans tabous, ce qui évite de perdre du temps et d’aller à l’essentiel de ce que l’on veut questionner pour avancer. Et surtout, avec son don hallucinant, j’avais le sentiment d’être profondément comprise. Pour moi, c’est une démarche saine, complémentaire à un suivi psy. J’appelle cela de la “psychothérapie ésotérique”. »
“Un domaine à la croisée des sciences et de la psychologie”
Une bonne dose d’intuition suffit-elle vraiment à panser les blessures psychologiques ?
Le potentiel du voyant repose sur l’empathie, l’écoute et une lecture fine de l’être humain qui permet de donner des bons conseils. » Malgré la vitrine 5-étoiles bâtie notamment à l’aide de célébrités qui ont recours à l’astrothérapie, comme Eva Longoria et Gwyneth Paltrow, et qui démocratisent la pratique, le tabou persiste : « Consulter un voyant reste en France de l’ordre de l’intime.
Dans les entreprises, c’est vrai que de plus en plus de patrons ont tendance à recruter à partir de thèmes numérologiques, astraux, mais ils n’osent pas l’avouer ».
Pourtant, et parce que l’astrologie et les prédictions ne sont plus « un truc de bonne femme » mais un domaine à la croisée des sciences et de la psychologie, ce sont les gens diplômés, avec des jobs à haute responsabilité, qui consultent le plus et cherchent à être coachés.
On se souvient que les anciens présidents Ronald Reagan et François Mitterrand avaient leur astrologue attitré pour les conseiller dans leurs décisions.
Si on remet les clés de son destin à ces guides spirituels, c’est aussi parce qu’ils savent mieux que personne nous parler en nous plaçant au plus profond de ce qui paraît être un déterminisme fascinant et unique : notre place dans le cosmos.
Une conséquence de la postmodernité qu’avait très bien analysée Edgar Morin, évoquant une « astrologie d’élite » : « Elle répond aux aspirations les plus profondes de l’individu moderne : la quête d’identité et la quête de sens. Le thème astral, à l’inverse de l’horoscope de masse, concerne l’individu dans sa singularité et répond à ses deux incertitudes fondamentales : qui suis-je ? Quel va être mon destin ? »
“Un bon médium refuse les accros aux prédictions”
Y a-t-il un risque de créer de véritables assistés ? « J’ai vu des chefs d’entreprise incapables de se déplacer sans leur numérologue ». Devenir addict aux voyants,
« Un bon médium refuse les accros aux prédictions. À ceux qui ont fait le tour des voyants pour entendre ce qu’ils ont envie d’entendre, je fais comprendre qu’ils doivent surtout soigner leur névrose. « En étant disponible le jour et la nuit, nous sommes un peu les SOS Amitié, SOS Suicide de personnes qui ont besoin d’être rassurées et de trouver des solutions. Attention, on ne remplace pas un médecin compétent : si la personne a besoin d’un suivi médicamenteux et psychiatrique, il faut impérativement la réorienter vers un spécialiste. »